Clichés et stéréotypes

Par Nila Kazar

#autoédition #numérique #indé #romance #thriller #avantgarde

Longtemps j’ai cru que le Nouveau Monde éditorial, avec ses pratiques émergentes – hybridation auteur traditionnel/autoédité, dématérialisation des supports, communication sur les réseaux sociaux, relation directe auteur/lecteur –, ouvrirait la voie à une littérature nouvelle, audacieuse, non-formatée.

Un éditeur de mes amis, que j’initiais aux merveilles de ce Nouveau Monde (il y en a, mais ce n’est pas l’objet de ce billet), s’est déclaré « impressionné par mes résultats ». Il faut préciser que, bien qu’il ne soit pas un débutant (il a 45 ans), pour lui « le numérique reste une sorte de continent inexploré » ; ce qui est, je le crains, très répandu dans l’édition tradi. Lui-même n’est pas du tout présent sur les réseaux sociaux, c’est vous dire l’archaïsme du mec… Je le cite, parce qu’il sait aussi être drôle :

« Le numérique me fait penser aux templiers. Petits groupes, petites actions, et peu à peu tout cela prend de l’ampleur. Sauve qui peut du côté des grands pouvoirs, il va falloir exterminer. D’ici à ce que les chevaliers du numérique ne menacent de racheter Gallimard… De quoi produire une nouvelle d’anticipation qui pourrait être amusante ! »

Chevalier du numérique pilant un éditeur tradi, XIIIe siècle

Mais quand je reverrai cet ami, je serai sans doute obligée de lui dévoiler les côtés moins réjouissants de ce Nouveau Monde éditorial. J’ai suffisamment dénoncé les travers de l’Ancien Monde dans mes billets précédents pour m’accorder une totale liberté de critique de celui-ci, que je côtoie depuis 18 mois. Et tant pis pour ma popularité !

Rêvons un peu : on aurait pu imaginer que l’ « indésphère », comme on appelle maintenant les autoédités, serait le nouveau vivier de l’avant-garde, de la contre-culture, de la fiction alternative, de l’expérimentation. Qu’elle serait le refuge des écrits non-calibrés d’auteurs déviants. Un lieu d’exposition pour la partie immergée de l’énorme iceberg littéraire qu’évoque ici P. Jourde. Bref, une sorte de Salon des refusés foutraque et jouissif (« ce Salon est une illustration de l’émergence d’une modernité artistique, en opposition avec le goût officiel », selon Wikipédia), où il serait possible de déployer toute son audace, de même que les Impressionnistes ont retourné en leur faveur ce qui, au départ, était un mot de dérision de leurs adversaires, et l’ont érigé en nouveau courant pictural.

B. Perat, 1866

Par parenthèse, voir ses manuscrits refusés n’a rien de déshonorant. Vous pouvez à ce sujet consulter mon billet sur le refus d’éditer, qui se trouve au premier rang des visites de ce blog. Cela arrive aussi aux auteurs chevronnés, dans un contexte où l’édition est de plus en plus prudente dans ses choix, recherchant une rentabilité rapide, ciblant le mainstream (ou grand public) et crachant à une cadence industrielle des lavres (définition : le lavre est au livre ce que la musaque est à la musique) dotés de la durée de vie d’un protozoaire et, hélas, de la même capacité de réplication. Sauf que les protozoaires, au moins, dépolluent les milieux, alors que les lavres, eux… Bref ! Revenons à nos moutons.

Je ne parle pas ici des revues littéraires gratuites, qui assument en partie ce rôle de défricheur mais restent très confidentielles. Dans le secteur des écrits commercialisés en ligne, c’est le contraire de ce que j’imaginais qui est arrivé. Certes, quelques « indés » s’illustrent bravement dans le Nouveau Monde. Ainsi, Céline Barré ou Aloysius Chabossot renouvellent l’humour d’Alphonse Allais ; Frédéric Soulier reprend le style rabelaisien de Frédéric Dard en le mâtinant de Bukowski ; Chris Simon applique au livre le principe de la série audiovisuelle. Ces auteurs naviguent avec talent dans des niches auxquelles l’édition tradi ménage peu de place. Bien sûr, on trouve des perles dans tous les genres parmi les livres autoédités au format numérique. Mais pratiquement rien de vraiment subversif.

Merci de ne pas déclencher tout de suite l’hallali, patience, je vais vous fournir très vite davantage de raisons de le faire 😉 !

La majorité des indés ne fait souvent que reprendre les vieilles recettes éculées du succès ; que débagouler à satiété des sous-sous-produits du mainstream. Fascination pour les pseudonymes ou les noms de personnages à consonance américaine, titres banals qui ont traîné partout, ficelles simplistes, retournements téléphonés, exposition dès la première page de la philosophie que le récit va ensuite tenter d’illustrer, prêchi-prêcha omniprésent (le syndrome Paulo Coelho)… Il n’est question que de « destin, d’âme, de serment, de cœur, de malédiction, de passion » (« écrire est une passion », cette phrase me fait empoigner mon fusil à pompe sur-le-champ, de même que « lire est une évasion » – vous voilà prévenus). L’auteur s’y transforme en dealer d’émotions, came très prisée des indés et apparemment de leurs lecteurs, comme on le voit dans les quatrièmes de couverture et les commentaires.

Juste une petite question à ceux qui se vautrent dans ces stéréotypes : pourriez-vous me dire ce qu’est, ou a été, ou sera, votre destin à vous ?

Non ?

Ben voilà.

Cornegidouille, mes amis, la VIE (vous savez, la vie ?) est tellement plus vaste, complexe, inattendue, contradictoire, décevante, renversante que ça ! Or la tâche du roman ne serait-elle pas de nous proposer un reflet de la vie, passé au filtre de notre subjectivité, de notre expérience, de nos moyens artistiques ? (Désolée d’enfoncer une porte que je croyais ouverte, à tort apparemment.) Actionner à tout bout de champ l’interrupteur « émotion », c’est un peu comme quand le marteau du médecin teste vos réflexes. C’est déclencher un automatisme. Trop facile…

Mais ça marche ! C’est pourquoi les 80 premiers titres du Top 100 d’Amazon sont des romances (ou romans sentimentaux) : Harlequin über alles, and Mrs Feelgood takes all the rest. Bon, il y a bien quelques excellents polars qui cartonnent, soyons juste… Et la nature commerciale du diffuseur explique en grande partie cet état de fait. Mais notre devoir, auteurs indépendants, ne serait-il pas justement de tenter de repousser 1. nos propres limites créatrices, et 2. les limites de la fameuse plateforme commerciale par la même occasion ? La fiction est un territoire sans frontières, où chaque auteur a le droit, le pouvoir et la liberté d’explorer des formes inconnues, des thèmes inédits. Pourquoi ne pas user de ce privilège insensé ?

Je m’interroge. Parce que je ne comprends pas. Sincèrement, je ne comprends pas. J’ai gobé quelques-uns de ces sucres d’orge, j’ai bu de cette eau-de-rose insipide. Je m’ennuyais atrocement, la tablette me tombait des mains. Et je me suis demandé pourquoi tant de gens en consommaient.

Parce que, tout de même. Dans l’univers unidimensionnel des lavres, « un jour mon prince viendra, le passé finit toujours par nous rattraper, ce jour-là tout a basculé, tu tombes sept fois tu te relèves huit ». Les personnages y apprennent « que l’amour peut arriver par surprise ou mourir en une nuit ; que de grands amis peuvent devenir de parfaits inconnus, et qu’au contraire, un inconnu peut devenir un ami pour la vie ; que celui qui veut, peut et y arrive… » Aarrrggh !

J’ai besoin d’une tisane Sérénité, là.

Un soupçon de réponse à ma question a fini par s’esquisser : le succès de l’attendu, du convenu pourrait peut-être trouver sa source dans le plaisir qu’ont les enfants à entendre raconter chaque soir la même histoire conventionnelle, hypercodifiée, ne souffrant pas la moindre modification, dont le dénouement procure un sentiment d’accomplissement, de plénitude… Dans ce cas, l’acte de lire serait avant tout destiné à rassurer, à conforter les croyances, à consolider les repères. Mission que remplissent aussi les blockbusters au cinéma – appelons-les falms.

Faut-il croire que nombre d’adultes sont restés (en partie du moins) infantiles ? Serions-nous donc des mômes qui auraient besoin, avant de s’endormir, qu’on leur resserve encore et toujours la même lavasse, la même distraction mécanique, à mille lieues du miroir de la vie que devrait être la fiction littéraire ?

À part les romances, dans l’indésphère on trouve aussi beaucoup de thrillers qui rivalisent de noirceur et de perversité, dans une surenchère sanglante et gore : « une descente au plus noir de l’âme humaine », nous promet un avis de parution. Là, la méthode semble être non plus le marteau réflexe des émotions, mais plutôt le gourdin franc et massif du néandertalien : on cherche à vous estourbir sous le faix de l’horreur. Yep. Mais vous croyez vraiment qu’en débitant les pucelles vivantes en tranches plus fines que chez l’auteur d’à côté, la littérature y aura gagné quelque chose ?

Laissez-moi vous révéler un truc, mes minous jolis : le monde des humains est gris. Avec des ombres, des contrastes, des trouées de lumière – mais gris, en général. Et seules les infinies nuances de ce gris (sans jeu de mots avec Truc) valent la peine d’être décrites dans un livre. Ah, sûr, c’est vachement plus difficile que de recourir au premier cliché venu. Ça demande beaucoup plus de travail et de maturation. Mais après tout, « sortir de notre zone de confort », n’est-ce pas précisément ce que toutes les daubes de développement personnel nous recommandent ?

Les lavres sont-ils le fruit du choix inconscient d’auteurs qui écrivent dans la veine de ce qu’ils aiment lire eux-mêmes ? Sans doute, mais pas toujours. Puisque les vieilles recettes éculées garantissent un minimum de succès, puisque les lecteurs peu exigeants recherchent sans cesse les mêmes stimuli, détestant être déroutés, pourquoi prendre des risques ? Davaï, fourguons-leur encore une fois ce vieux chewing-gum mâché et remâché, enrobé dans le si rassurant prétexte de la lecture-évasion. Flattons la paresse et l’incuriosité du lectorat, et faisons-nous un peu de fric facile sur son dos…  En somme, imitons tout ce que nous reprochons à l’édition tradi !

Gustave Courbet, 1867

Là, je pense que le moment de l’hallali est arrivé.

OK. Ça va mieux ?

Chacun agit comme il veut ou peut. Je ne juge pas. Je donne simplement mon avis.

Moi, j’ai juste envie qu’un livre m’emmène là où je n’ai pas prévu d’aller, et pas dans des stéréotypes usés jusqu’à la corde. J’adore l’humour, et surtout l’ironie ; mais je veux être prise au sérieux en tant que lectrice. Pas qu’on me refile une came fadasse qui, même au tarif de 2,99€, ne les vaut pas.

Parce qu’elle m’empoisonne à petit feu, en loucedé.


Des questions, des commentaires ? Allez voir un peu plus bas ! Et si l’envie vous taraude de goûter à mes écrits, ne résistez plus : mon dernier roman, Platonik, est ici (imprimé ou numérique). Pour vous en donner le goût, vous pouvez lire cette chronique-ci, ou celle-là !

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39 réflexions au sujet de « Clichés et stéréotypes »

  1. Pourquoi donc l’hallali ? Tu tapes juste, tu tapes fort et tu pousses les uns et les autres à se remettre en question. C’est le gage d’un article de qualité. Merci à toi pour cette reflexion personnelle qui nous encourage à nous dépasser et à sortir des habitudes poussiéreuses dans lesquelles nous nous complaisons.

    1. C’est vrai que l’hallali, ce sont seulement les auteurs de daubes qui devraient le sonner. Mais comme ils ne liront pas ce billet, ou ne s’y retrouveront pas, ou l’oublieront très vite, au fond je suis tranquille!

  2. Excellent article. Comme toi, je pensais que le numérique apporterait de l’innovation, et il en apporte, seulement ces livres ne sont pas forcément des bestsellers. Hier, j’ai eu une conversation dans la rue avec un auteur qui vendait des livres, très beaux. Nous avons parlé de l’auteur dans l’obscurité et de l’auteur dans la lumière. Ce sont deux sortes d’auteurs. Ils n’ont pas la même fonction sociale, ton article me donne envie de creuser ce concept. Tu écris ce que les gens veulent lire, ou tu écris ce que les gens ne savaient pas ce qu’ils voulaient lire ? Ce n’est pas la même chose, ça ne demande pas les mêmes compétences.

    1. Merci Chris, tu mets le doigt sur la vraie question : « …ou tu écris ce que les gens ne savaient pas ce qu’ils voulaient lire ? » C’est le seul choix sérieux qui se pose aux auteurs, je crois.

  3. Toujours aussi délectables, tes articles, ma chère Nila !
    Au passage, je vois que mon terme d' »indésphère » entre peu à peu dans le vocabulaire de l’autoédition. Façon beaucoup plus amusante de marquer les réverbères que de jouer des coudes pour décrocher certains « prix littéraires », tu ne trouves pas ? 😀
    En tout cas, bravo pour ton courage. Continuons sur cette voie, et nous finirons honnies. À tout prendre, cela vaut mieux que de nous être incrustées dans l’édition, où les femmes auteurs risquent plutôt de finir au lit.

    1. J’ai adopté tout de suite ton terme « indésphère », tant il me semble approprié ! Et je ne crois pas que nous serons « honnies » par tous, seulement par ceux qui ne pensent pas comme nous. A mon avis, ils ne liront pas ou ne tiendront pas compte de nos réflexions, car ils ont trop intérêt à continuer ainsi.

  4. Nila se lâche! Billet assez réjouissant, je dois dire! J’ignorais ce mot, « lavre ». On en apprend tous les jours.

    En tant que grand supporter du mouvement indé, de ces Templiers modernes, presque par réflexe, j’aurais tendance à dire que, même si les auteurs indépendants concurrencent l’édition tradi jusque dans ses travers « lavresques », peu importe, du moment que les indés grappillent des parts de marché!

    Mais c’est vrai qu’en même temps, lire toujours le même livre, même si ça rassure certains, ça peut aussi être lassant.

    Je lisais quelque part qu’on écrivait un bon livre quand on se sentait gêné de se mettre à nu. Je pense en effet qu’il faut arrive à mettre beaucoup de soi-même dans ses livres.

    Après, je dis ça, je ne suis pas sûr de ne pas écrire de simple resucées de passages de livres qui m’ont plu. J’espère arriver à trouver ma voix par petites touches à force d’écrire, mais ça prendra du temps. Je comprends en tout cas que le fait de projeter son âme sur une page soit difficile, et que l’on préfère le bon vieux confort des stéréotypes.

    L’art est difficile (oui je sais, je stéréotype 😉 ).

    1. « Je lisais quelque part qu’on écrivait un bon livre quand on se sentait gêné de se mettre à nu »: cela rejoint complètement l’exergue de mon nouveau roman à paraître, une citation de Cioran sur les « hontes » comme source de l’écriture. Je connais ta démarche d’auteur indé, et même si je ne t’ai pas encore lu, parce que tu oeuvres dans un genre qui ne m’est pas familier, je sais que tu as un parcours exceptionnel. D’accord avec toi pour dire que l’aventure doit continuer, à condition d’essayer de l’orienter dans un sens plus convaincant. Vive les chevaliers du numérique!

      1. « … je ne t’ai pas encore lu, parce que tu œuvres dans un genre qui ne m’est pas familier »…
        Ainsi vous voilà pris au piège de ce que vous dénoncez par ailleurs…
        Vous ne lisez pas parce que vous préférez ce qui vous est familier…
        Comme quoi les choses sont plus complexes qu’il n’y paraît!
        🙂

  5. Donc, soit on écrit un texte cliché, avec une chance de trouver un lectorat « facile », soit on expérimente, en sachant qu’on ne dépassera probablement pas un cercle très restreint de lecteurs.

    Un choix cornélien.

    1. Il n’y a pas de « bon » choix, chacun fait ce qu’il peut/veut, j’essaye juste d’éclairer le choix. Ma propre langue est très classique, je ne suis pas du tout avant-gardiste, mais il me semble que les succès indés sont tellement à l’opposé de toute prise de risque, et tellement écrasants en nombre, que je m’insurge et me désole…

    2. Voilà une question qui mérite d’être posée.

      Comment s’assurer d’être lu, quand on sait que son œuvre est, par essence, difficile à appréhender? Car disons-le tout de suite, tout le monde n’est pas Umberto Eco. Ses romans « parcours du combattant » n’ont pu se frayer une place dans la panthéon des bestsellers qu’avec une grosse dose de chance là où une foultitude d’auteurs n’a trouvé que l’oubli. Comment arriver, dans ce monde où l’art se consomme de plus en plus rapidement sur le net, à intéresser le public avec un roman dont le ticket d’entrée intellectuel est plus élevé que la moyenne ?

      C’est une formule que j’essaye d’expérimenter dans la solitude de mon art et la pauvreté de ma maîtrise de l’écriture (oui, ce n’est pas gagné). Comment faire réfléchir l’humanité sur certains de ses comportements en écrivant un roman compréhensible par la majorité des mortels ? C’est un combat, que je sais déjà par avance perdu, mais que je ne peux que mener à son terme.

      Lorsque l’oubli répondra à ma tentative de postérité, les intellectuels pourront continuer à deviser sur ces ouvrages « lavrants » (moi aussi j’invente des mots en y incorporant le qualificatif « navrant ») et sur la perte de repères d’un lectorat toujours plus attiré par des œuvres faciles à appréhender.

      Pourquoi nous priver d’une postérité à laquelle nous aspirons tous simplement pour répondre à notre besoin d’honnêteté intellectuelle ?
      Moi j’ai fait mon choix, mais devrais-je pour autant jeter la pierre à ceux qui en ont décidé autrement ?

  6. Bonjour Nila Kazar,
    Moi aussi, je suis tombé sur des lavres en achetant quelques indés sur Amazon ou autres sites, ce qui m’a souvent découragé d’en acheter d’autres, même à 2,99€. Heureusement, en fouillant un peu, j’ai pu trouver de véritables perles comme ce roman « Les Partisans du moindre effort » de Gérard Tardy ou « Petites nouvelles du bois de Boulogne » du même auteur. Aujourd’hui, c’est aussi au lecteur de faire ce travail de défrichage (à la place de la critique officielle absente du secteur indé) et de transmettre ses trouvailles aux lectrices et lecteurs d’indés, sans oublier de signaler ses perles aux magazines littéraires en ligne.

    1. Oui, c’est au lecteur que revient la tâche de la « recommandation horizontale », mais que de temps perdu avant de repérer les perles… En tout cas, je note Gérard Tardy, merci du conseil!

  7. Je ne sais si je fais partie de la troupe des lavres, quoique le seul fait de me poser la question me livre déjà une partie de la réponse, mais je suis d’accord avec ton analyse. Je décide donc et décrète que dorénavant, je vais me battre avec moi-même et mon clavier pour tenter de ne pas tomber dans la facilité. Je t’ai déjà dit que j’aimais tes billets ? 🙂

    1. Cher Wendall, quoi que tu fasses ou écrives, j’ai appris à te connaître et je sais que tu es un type bien. Humainement, tu es quelqu’un de rare, honnête et plein d’empathie. Et ce commentaire ne fait que renforcer mon sentiment. C’est un processus très long et difficile d’apprendre à devenir soi-même en tant qu’écrivain. Mes vœux t’accompagnent. Amitiés sincères de Nila.

  8. Un pavé dans la mare qui fait plaisir à lire. J’ai décidé de laisser de côté la SF pour la romance parce que je voulais vivre de ma plume. Et j’ai décidé de partir dans les sous-genres qui plaisent et qui marchent. Parce que c’est fatiguant. Sortir des clichés, tenter de faire des choses originales à contrecourant, intelligentes, c’est fatiguant et cela ne paie pas. Je ne parle pas d’argent mais de reconnaissance. Je ne suis peut-être pas correctement finie, mais j’ai moi aussi envie d’avoir des lectrices qui me disent: «Kyaaa!!!!! Le héros il est trop classe!». Mais là, quand tu sors des sentiers battus, tu peux te brosser. Alors j’ai décidé de faire comme tout le monde. Bah… j’y arrive pas. Tout se transforme, m’échappe… Donc au final, j’ai choisi d’écrire des choses qui me ressemblent (en romance, la SF, je sais bien qu’il n’y a pas d’espoir). Cela ne sera sûrement pas un carton mais ce sera toujours mieux que l’indifférence générale…
    Après, si tu peux te permettre d’aller vraiment au-delà des clichés sans mourir de faim, bravo, l’humanité en a besoin! (et ceci n’est pas une blague!)

    1. Belle démarche, honnête… J’ai lu quelques textes de toi et je trouve que tu as du talent. Si ça peut t’aider de le dire 😉
      Moi, j’essaye de vivre de ma plume depuis l’âge de 20 ans. Certaines années, j’y arrive, mais la grande majorité du temps, je fais des jobs mercenaires. Et je suis pauvre, parfaitement. Mais si je mets la barre aussi haut, c’est parce que je n’arrive pas à être autre chose qu’écrivain…
      Je ne prétends pas du tout vouloir que les indés m’imitent, mais un peu plus d’exigence serait bienvenue, tout de même!

  9. Merci pour ce billet. Vraiment. Merci ♡

    Mon mari me pousse vers l’édition traditionnelle, lui qui fait des films indés depuis 10 ans. « Si j’avais su (que ça serait si difficile d’en vivre), j’aurais tourné des trucs plus commerciaux… » qu’il me dit. Alors je doute.

    Au fond, je n’ai pas envie de plaire aux masses en écrivant de l’eau-de-rose. Je veux écrire des choses qui ont du sens. Pour moi déjà. Pour les autres aussi, pourquoi pas. Donc la démarche indépendante me semble logique. Mais ses propos me font douter.

    Et puis je lis un billet comme celui-ci. Et je ne doute plus! Encore merci.

    1. Quand il s’agit de payer ses factures, évidemment, je comprends votre mari (je suis pauvre). Mais il ne faut écrire QUE les « choses qui ont du sens », c’est là le secret. Ensuite, le talent est un paramètre qu’on ne contrôle pas. Et la chance, très important, ça, la chance…
      Heureuse que ce billet vous ait plu, j’en ai d’autres en préparation sur le Nouveau Monde éditorial. Dans les précédents, je décrivais l’univers de l’édition traditionnelle. N’hésitez pas à y piocher des infos, en vous souvenant que je suis assez critique, c’est la nature de l’exercice qui veut ça; mais l’art n’a que faire de ces contingences, il est indépendance avant tout!

  10. Penser que l’indéspère était amenée à produire du « nouveau » parce que « indé », c’était un peu naïf, quand même 🙂 Sans jouer les Seldon de Asimov, la loi des grands nombres nous laissait peu de chances : il était couru d’avance que nous n’aurions au final qu’un duplicata de l’édition traditionnelle, un marché juste parallèle. Non seulement les statistiques poussaient dans ce sens, mais en plus la majorité des auteurs indés pratiquent l’écriture en amateurs : cela leur donne encore moins de chances de défier les prévisions.
    La production littéraire obéit à une simple répartition en loi normale, que ce soit en terme de qualité littéraire ou d’originalité : une masse centrale et omniprésente de livres moyens et/ou déjà vus ; et ici ou là un véritable talent, et/ou quelque chose de vraiment innovant (ou, je préfère dire, « personnel » : je ne recherche pas tant l’originalité en elle-même qu’un texte vraiment propre à l’auteur, avec une identité).
    On peut s’insurger, mais, hey ! C’est juste la vie. M’enfin, ce n’est que mon avis. 🙂

    1. Vous avez raison, mais c’est ma nature de m’insurger, je ne sais rien faire d’autre malgré le peu d’effet récolté 😉
      Et puis c’est aussi la nature d’un billet de ce genre, on accentue son point de vue pour se faire comprendre…
      Sinon, votre formulation écrit « personnel » me convient. « Je ne recherche pas tant l’originalité en elle-même qu’un texte vraiment propre à l’auteur, avec une identité »: on est d’accord, c’est le plus important.
      Bon, je repars m’insurger contre d’autres trucs, avec votre permission 😉

  11. Une réflexion très intéressante. Il me semble, mais je me trompe peut-être, que les balbutiements de l’auto-édition étaient plus clairement marqués par les écrits plus marginaux, ceux qui n’avaient pas leur place dans les catalogues des éditeurs et qui ont été obligés de se forger une place en s’adressant directement aux lecteurs. Et le succès de certains, qui de plus en plus sont repérés par les maisons d’édition et sortent ainsi de la clandestinité, a donné à l’auto-édition ses lettres de noblesse, émulant ainsi une nouvelle génération d’aspirants écrivains à tenter leur chance. Tout comme le succès planétaire de « Cinquante Nuances » a pu donner naissance à des milliers de clones. Une bonne chose en soi pour secouer la sclérose dont semble atteinte une partie de l’édition traditionnelle qui sait bien, par expérience, que les écrits audacieux ou novateurs dépassent rarement la centaine d’exemplaires vendus. Il y a des exceptions, mais il y en a peu. À terme, donc, il était inévitable que l’auto-édition se mette à ressembler à sa grande sœur parce qu’il y a malheureusement une équation qui rentre en jeu, c’est que, à très peu d’exceptions près, l’originalité vend peu. Si le lecteur ne peut pas immédiatement vous coller dans une case précise, c’est beaucoup plus difficile de l’interpeller. Pas que les lecteurs soient des idiots mais ils ont besoin de repères. Dénicher des nouveaux talents demande des efforts et la lecture n’est, pour beaucoup, qu’un moyen de détente ou d’évasion. Lire c’est comme partir en vacances, pas partir au boulot. Pas pour tout le monde, mais pour beaucoup, pour nous-mêmes parfois. S’aventurer seul ou seule sur une route peu fréquentée n’est pas un choix facile pour l’auteur, quand il voit chaque jour les autoroutes bouchonnées autour de concurrents qui recyclent à l’infini la même histoire déjà testée. Il contemple ses chiffres de vente et les compare à d’autres et se demande pourquoi il se donne tout ce mal. Ça demande du courage de ne pas céder à la facilité. Ça interroge également sur la justesse de son choix. Faut-il rester prisonnier de sa tour d’ivoire ou accepter de donner au public ce qu’il semble vouloir? Qui est le maître, de l’écrivain, du personnage ou du lecteur? Une question qui n’est pas si anodine, à mon avis. Personnellement, j’ai choisi de rester maître de mes écrits mais est-ce que je tiendrai la distance? Ou ai-je même raison?

    1. Merci pour cette mise en perspective, comme je ne fréquente le Nouveau Monde éditorial que depuis 18 mois, elle me faisait défaut.
      Je comprends très bien le processus qui amène un auteur à s’adapter au goût dominant pour obtenir du succès, surtout s’il/elle essaye d’en faire une activité rémunératrice. Mais j’ai opté pour une approche semblable à la vôtre depuis trop longtemps pour en changer…

  12. Article super intéressant ! Et dont je partage totalement la conclusion, d’ailleurs : « Moi, j’ai juste envie qu’un livre m’emmène là où je n’ai pas prévu d’aller, et pas dans des stéréotypes usés jusqu’à la corde. » 🙂
    Sinon, je pense que croire que c’était l’indé qui va pouvoir offrir ça est une jolie utopie, en effet (sauf pour des exceptions, bien sûr). ^^ Du moment où il y a une logique commerciale, ça ne peut pas aller, et d’ailleurs les éditeurs œuvrent en grande partie à un formatage qui nous dépasse : on peut mettre toutes les originalités que l’on veut dans nos romans, elles vont être le plus souvent passées sous silence pour ne plus garder que les grandes lignes commerciales, comme par exemple pour la romance : patron (sexy), highlander (sexy), bad-boy (sexy), new romance, contenu sulfureux inside, comédie romantique avec du peps… Et je ne doute pas que ce soit pareil dans les autres genres. Le reste, soit tout ce qu’il y a d’originalité, n’a pas de potentiel assez vendeur pour être mis en avant, ou alors de manière discrète : c’est le cliché qui est attendu, pas l’originalité.
    Par contre, mon expérience de la publication/lecture sur le net m’a montré que l’originalité y a une place bien plus importante/une bien meilleure visibilité, justement parce qu’il n’y a pas d’impératif commercial. Et d’ailleurs, de nombreux genres populaires émergents le sont en fait depuis des années, sur le net : il faut juste que ça passe d’abord par là pour pouvoir être remarqué sur le plan commercial. Donc je ne suis pas étonnée que ça ne se passe pas plus que ça (sauf exceptions) dans le monde de l’auto-édition, qui est régi par ces mêmes impératifs commerciaux.

    1. Mille mercis pour cet éclairage complémentaire! Oui, c’est vraiment le facteur commercial qui semble faire la différence. Les sites qui n’ont d’autre but que d’échanger autour de textes écrits en toute liberté restent des viviers d’innovation, tout le reste est régi par les lois d’airain du mainstream. Bien dommage!

  13. C’est drôle : j’ai moi-même été un bon moment « de la maison » en tant que Rédac-Chef pour divers magazines, puis Dir. Litt. pour les éditions ENCRES ; malheureusement trop tard pour redresser une situation financière que la maladie du PDG du groupe avait laissé se détériorer trop avant…
    Par la suite et sous un pseudo (Timothy Olgersson), j’ai jadis publié quelques nouvelles sur un site d’E-éditions dont le nom signifie « encre » en latin…
    On y trouve beaucoup de pire et infiniment peu du meilleur, mais chaque petite crotte y est saluée par une débauche de « Merci ! Merveilleux ! Encore ! » etc. ; toujours distillés par le même collège de quatre ou cinq pintades – mâles et femelles, vive la parité ! – dont on a l’impression qu’elles sont en permanence à l’affût du retour d’ascenseur quant à leurs « oeuvres » personnelles. J’ai eu le tort d’en faire la remarque sans prendre trop de gants (voir ci-dessus ce que vous rapportez à ce propos) ; résultat : viré sans aucune explication ni autre forme de procès par le ouèbemasteur…
    Pourquoi, me suis-je interrogé ? Eh bien, tout simplement parce que ce monsieur propose divers services, dont l’édition-papier (à pas moins de 89€ les 100 pages, qu’il fait réaliser au Canada ou ailleurs pour entre 10 et 12 euros) et qu’à partir de là, tout est éditable… pourvu que ça rapporte ! Et dire aux gens : « Votre bouquin, c’est de la gnognotte (ce n’est pas tout à fait le terme qui me vient à l’esprit en premier…) » risque de porter préjudice à son petit commerce, fondé uniquement sur la vanité d’auteur de ses clients.
    A ce propos, il me souvient avoir vu un jour sur les rayons de la bibliothèque du bureau de B. Grasset (Aaahh ! qui nous rendra Françoise Verny ???) un bouquin d’un type dont je n’avais JAMAIS entendu parler. Face à ma surprise, Grasset me rétorque : « Ben oui ! C’est mon dentiste. Il avait écrit ça et me suppliait de l’éditer… Nous avons fait un deal : il m’a fait un superbe double bridge gratos… en échange du bouquin. Voilà. » Autrement dit, vous avez plus de chances de vous voir éditer si vous êtes un champion de la fraise et du moulage dentaire que l’écrivain du siècle !
    Quant à la persévérance, l’une de mes amies, proche de Hemingway et aujourd’hui décédée, Amaury T. J. (qu’elle me pardonne…), a fait le siège du même Grasset pendant des mois (des années ?) avant que, lassé, le grand éditeur n’accepte son bouquin, prémonitoirement intitulé « La Pierre d’Oubli ». Livre paru en même temps que les Mémoires de je ne sais plus quel politique en vue à l’époque. Du coup, tout le budget pub de Grasset est passé sur l’autre et la « Pierre d’oubli »… a très vite été oubliée : service de presse compris, plus les copains, plus la famille, plus les bibliothèques, Amaury a dû en vendre 350 exemplaires. Tout au plus. Et c’est déjà pas mal ! Encore mon ex-femme, à l’époque directrice des Relations Publiques à FR3-National, s’était-elle défoncée pour lui faire avoir conférences, interviews radio, entrefilets de presse, etc.
    Bref : il y a quelque chose de pourri dans l’édition française, et ce n’est pas le tableau des « Goncourables 2017 » qui va y changer quoi que ce soit !
    Soupîîîîîîrrrr…

    1. Outch! quel tableau… Merci pour ce témoignage sans concession.
      Pour ce qui est des turpitudes de l’édition tradi, je ne suis pas étonnée. L’anecdote des bridges de B. Grasset est savoureuse!
      Pour ce qui est des retours d’ascenseur entre aspirants auteurs et des arrière-pensées de ceux qui leur proposent leurs services intéressés, il est édifiant. Et même si je n’ai pas pratiqué personnellement ce genre de site, je crains que votre analyse impitoyable ne soit assez fondée 😉

  14. Ce que j’aime ton style de rebelle ! Comme toi, vouée aux travaux de mercenaire, j’écris seulement dans le bonheur d’écrire et, voyant l’état du monde, je me console de plus en plus en me disant que vouloir y percer tient d’un égo malade. J’ai vu une vidéo où une sonde spatiale avait pris une photo de la Terre depuis Mercure: pas plus grosse qu’un grain de poussière dans un rayon de soleil. C’est de là que je me regarde désormais et que je me dis: « Continue d’écrire même si tu n’es rien ni personne. Vis ton moment présent, aime les gens qui ont besoin de toi, fais ton temps et sois honnête avec toi-même. » Écrire de la daube pour un monde infantile qui refuse de grandir ? Non ! Il grandira, peut-être, et ce sera grâce à nos écrits, pourquoi pas Nila, dans le futur… Sapho la poétesse a écrit: « Quelqu’un dans l’avenir se souviendra de nous ». Certes, nous ne serons plus là pour en profiter financièrement, c’est sûr, à siroter un punch fait maison dont cette petite planète, bien courageuse de nous supporter, a le secret.

    1. Merci Hélène, je suis touchée par tes propos… et je partage ta philosophie: « Continue d’écrire même si tu n’es rien ni personne ». C’est bien ainsi qu’il faut voir cette activité si « déplacée »… « Sois honnête avec toi-même » aussi est un mantra fondamental. Merci encore!

  15. Bonjour,
    Je découvre juste ce blog, et je pense que je vais traîner un peu dans le coin, les articles me semblent bien intéressants^^

    Pour ce qui est de cet article-ci, je ne peux qu’être d’accord. Cela fait quelques années maintenant que je côtoie des forums d’écriture, et toujours les mêmes discours à base de « n’écris pas ça, ce n’est pas vendeur, écris comme ci pour plaire aux éditeurs etc… ». Déjà, je ne suis pas fan de cette idée, qu’un auteur doive écrire pour plaire aux éditeurs, privilégiant une qualité commerciale plus que « littéraire » (au sens large).
    En ce qui me concerne, je sais qu’aucune maison d’édition n’acceptera de publier mes textes (même si je leur enverrai probablement, au cas où). Et au final… ce n’est pas grave.

    Je n’ai jamais rêvé d’être écrivaine. L’écriture n’est pas une passion pour moi, pas alors que l’écriture me demande autant d’énergie. J’écris parce que cette histoire s’est imposée et que je veux la raconter, c’est tout. Du coup me plier à des exigences commerciales n’aurait pas de sens. A mes yeux, ce serait trahir cette histoire.

    Alors, quid de l’auto-édition ? C’est vrai que ce serait une solution. Sauf que. Tout n’est pas à jeter, loin de là, j’en ai même lu des très bons, mais quand je vois certains textes bateaux ou vendus sans relecture… Comment surnager ? Et puis, pourquoi lirait-on mes romans et pas celui du voisin ? En ce qui me concerne, je ne me vois pas proposer mes textes en échange de quelques pièces alors qu’ils n’auront pas eu la « légitimité » d’avoir été choisis par un éditeur (ce n’est que mon avis, qui concerne mes textes, pas forcément ceux des autres). Et puis, comment savoir qu’on peut arrêter les corrections sans « validation » ? Un jour, peut-être que je dépasserai cet a priori, mais pour le moment…

    1. Merci pour cette belle contribution!
      Je réagirai uniquement à vos dernières phrases: « En ce qui me concerne, je ne me vois pas proposer mes textes en échange de quelques pièces alors qu’ils n’auront pas eu la «légitimité» d’avoir été choisis par un éditeur. Et puis, comment savoir qu’on peut arrêter les corrections sans «validation»? »
      C’est une vraie question, à laquelle chacun répond en fonction de son parcours et de sa sensibilité. Moi aussi, j’ai longtemps pensé qu’une instance tierce était nécessaire pour « valider » mes livres. Et puis, les usages de l’édition ont considérablement évolué, comme j’essaye de l’expliquer dans ce blog. Si l’on a déjà publié plusieurs livres de façon traditionnelle, et que l’on commence à se heurter à des rejets systématiques de ses manuscrits, alors qu’on a choisi d’être écrivain avant tout, que faire? Si l’on n’a plus besoin de faire ses preuves, parce qu’elles sont faites depuis longtemps, vers quoi se tourner?
      Je tâtonne à la recherche d’une réponse.
      Mais il est certain que la nécessité d’un avis extérieur sur le texte, avis compétent et bienveillant sans être complaisant, demeure incontournable.
      Bref, c’est compliqué 😉

  16. Il y a une question que je me pose depuis que je sais écrire (au sens tout à fait élémentaire du mot : tenir un crayon et lui faire faire autre chose que des barbouillages sur ma feuille…) : Pourquoi est-ce que j’écris ? autrement dit, pourquoi est-ce que je me sens/je suis poussé par ce besoin irrépressible de faire courir le crayon ou la plume sur la feuille de papier pour « raconter une histoire » ? Le corollaire de la chose étant « … et qu’attend donc celui ou celle qui va me lire ? »
    L’un de vos correspondants a écrit que lire un bouquin doit être un départ en vacances et non pas un boulot… Je suis tout à fait en phase… mais tout le monde ne choisit pas d’aller en vacances au même endroit ! (encore que…)
    Si vous avez des éléments de réponse (même personnels !) à ma question, je suis preneur !
    Autre chose : je discutais hier avec un jeune aspirant-écrivain (23 ans, soit…. un demi-siècle de moins que moi !) qui voulait savoir d’où je tirais mes personnages et s’ils étaient purement fictifs ou si j’utilisais des « patrons » (au sens « couture-confection » du terme ; « pattern » pour utiliser un anglicisme de plus !) existants que la vie (la vraie) m’avait fait croiser ou rencontrer.
    Là encore, incertitude et scepticisme : rien ne peut naître de rien et il est fort probable que le plus « imaginaire » de mes protagonistes plonge ses racines dans les couches encore inexplorées de mon subconscient. Mais qu’est-ce qui le fait émerger, lui et pas un autre ? en fonction de quel(s) critère(s) et en vue de quelle utilité – sinon satisfaction – attendue ? Autre question restant toujours en suspens pour le moment…
    Enfin, un autre constat qui l’a beaucoup surpris : celui que l’absolue indépendance de « mes » créatures ! Du moment où je les ai tirées du néant et posées sur le papier, elles se ruent aussitôt sans plus me demander mon avis sur des « devenirs » dont je n’avais le plus souvent aucune idée au départ et ce, à ma grande surprise la plupart du temps ! Ce que j’intitule très modestement le « Complexe de Dieu-le-Père » : le libre arbitre existe AUSSI pour les êtres fictifs…
    Explique qui pourra !
    Bon : on peut penser que ces diverses considérations nous éloignent quelque peu du sujet initial de ce « fil », mais je reste persuadé que l’acte d’écrire et celui de lire sont aussi inséparables que les Dioscures Castor et Pollux, et donc que l’on ne peut apporter de réponse valable à l’un sans tenir compte de l’autre ; une fois cette nuance assimilée, les distinctions entre E-édition indépendante et/ou édition classique se profilent sur un horizon nettement plus nuancé, à défaut d’être plus intéressant : la majorité des « écrivains », pro ou pas, a des problèmes d’Ego (et je ne déroge pas à la règle !) ; la « tentation d’écrire » me paraît alors une façon plutôt positive de se distancier de ces problèmes, sinon de les résoudre…!
    T.O.

    1. Ouh là, vous posez toutes les questions de fond sur l’écriture:
      – Pourquoi écrivons-nous?
      – Qu’attend le lecteur?
      – D’où surgissent nos personnages?
      Ce sont des questions auxquelles, certes, je réfléchis depuis longtemps, et je leur ai même trouvé deux ou trois réponses personnelles, mais qui débordent de beaucoup le cadre de ce blog 😉 consacré, je le rappelle, aux évolutions récentes de l’édition.
      Je me contenterai d’abonder fortement dans votre sens quand vous rappelez que lire et écrire sont deux actes indissociables. On ne saurait le répéter assez!

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